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vins, vignobles et vignerons
19 avril 2013

Masterclass de printemps avec l'Oenothèque Alsace - 2013


Malgré un hiver qui s’éternise dans notre belle région, la nature et ses pollens sont bien à l’heure et c’est grâce à un cocktail médicamenteux qui aurait mérité sa place dans la mallette d’un soigneur de l’équipe US Postal, que j’ai pu me rendre dans un état physique acceptable (sans plus) à cette session de dégustation organisée par Thierry Meyer.
Après une longue pause, l’Oenothèque Alsace reprend ses activités par une séance consacrée à un thème unique :

Les pinots noirs 2003

Année historique par sa canicule et sa sécheresse, 2003 a mis les viticulteurs alsaciens en présence d’une matière première exceptionnellement riche et concentrée, notamment sur les pinots noirs.
Dans leur prime jeunesse, les rouges issus de ce millésime ont révélé des matières solidement charpentées mais très gourmandes avec des caractéristiques gustatives particulièrement  séduisantes bien qu’un peu atypiques pour la région.
Avec près d’une vingtaine de flacons de pinots noirs 2003 proposés cet après-midi, Thierry nous invite à vérifier si après 10 ans de garde ces vins se montrent toujours encore à la hauteur de la réputation acquise dans leur prime jeunesse.
Au bout de la série nous saurons peut-être si les pinots noirs 2003 étaient vraiment aussi grands qu’on le pensait ?

Masterclass Alsace du 13 avril 2013 à Colmar

Pour cette session Thierry a mis en œuvre un protocole complètement inédit : les bouteilles sont transvasées dans des bouteilles standard, numérotées et placées dans un ordre aléatoire.
En plus d’une petite hiérarchisation qualitative personnelle, le maître de cérémonie nous propose de repérer :
- le vin identique au premier échantillon dégusté et commenté ensemble en début de série
- un second couple de vins identiques
- des éventuels intrus issus d’autres régions viticoles.

Les vins sont dégustés 3 par 3 à l’aveugle (même pour l’organisateur) – verres INAO.

Les impressions gustatives sont rédigées d’après les notes prises à l’aveugle, les commentaires (en rouge) sont rédigés après la découverte des étiquettes.

Hoppla c’est parti !


Vin 0 : intensité aromatique moyenne, notes confites de fruits noirs avec une petite touche chocolatée, attaque très douce, structure ronde, léger moelleux, finale sur les fruits mûrs avec une impression sucrée et une pointe alcooleuse.
Pinot Noir Clos Saint Imer – E. Burn
Suave et joliment fruité ce Clos Saint Imer se tient encore bien en laissant une impression juvénile et très gourmande mais le côté « sucraillon » de la cuvée dérange un peu.

038La série de bouteilles est prête et Thierry est déjà au travail


Vin 1 : notes métalliques à l’attaque puis évolution vers une palette assez fine sur les petits fruits rouges mûrs (fraise écrasée) avec quelques notes tertiaires, bouche légère, souple et bien équilibrée mais l’ensemble manque de concentration.
Pinot Noir Vieilles Vignes – A. Hurst

Vin 2 : notes de réglisse assez intenses à l’ouverture, évolution vers les fruits noirs, bouche dense et juteuse avec des tanins serrés mais fins et une finale fraîche.
Pinot Noir Rotmurlé-Terrasses – P. Frick

Vin 3 : olfaction douteuse sur le bois humide avec une touche végétale mais beaucoup plus net en bouche, structure équilibrée et tonique avec une finale acidulée qui livre quelques nuances torréfiées.
Pinot Noir F – V. Fleith

La première triplette de cet exercice de dégustation nous met en face de trois échantillons bien différents : avec le vin de Hurst on sent une évolution déjà bien avancée, la cuvée Rotmurlé de Frick se tient plutôt bien avec une belle matière joliment balancée et le pinot noir originaire du Furstentum présente un profil aromatique assez peu engageant tout en se montrant assez liant en bouche.


Vin 4 : élégance et belle complexité à l’olfaction, rond, souple avec un fruité épanoui et une matière bien posée en bouche, finale fraîche et sapide avec un beau retour finement tannique.
Marsannay Les Champs Salomon – Domaine Bart

Vin 5 : pureté douteuse au nez avec un fruit discret pollué par des notes bizarres (poussière, carton…), l’attaque en bouche est plus agréable, la matière est assez soyeuse…on se mettrait presque à espérer, hélas la finale dure et très tannique ne laisse pas une très bonne impression.
Pinot Noir Fût de chêne – Wolfberger

Vin 6 : fruité expressif et finement torréfié au nez, rondeur et chair soyeuse de l’attaque jusqu’au milieu de bouche, dommage pour cette finale rendue austère par des tanins très virulents.
Pinot Noir F-Rouge de Zellenbberg – Becker

Avec ce premier pirate démasqué sans aucune hésitation nous tenons une splendide expression de pinot noir qui s’avérera être pour moi (et de loin…) la plus belle bouteille de la série…chapeau bas au domaine Bart.
Ses deux compagnons de table n’ont vraiment pas pu rivaliser : la cuvée Wolfberger semblait déjà très fatiguée et le pinot noir issu du terroir Froehn (classé G.C.) des Becker pourtant doté d’une belle palette aromatique montrait hélas une dureté rédhibitoire dans sa texture.


Vin 7 : palette mûre et séduisante avec une touche lactée, caramel et torréfaction suivie par de belles notes de fruits à noyau, bien ronde à l’attaque, la matière se durcit un peu vers la finale, mais l’ensemble reste assez gourmand.
Pinot Noir Cuvée Frédéric – F. Becht

Vin 8 : fruits noirs (mûre, myrtille) et un côté légèrement terreux au nez, densité et volume conséquent en bouche avec un fruité bien mûr mais la finale est marquée par des tannins secs et assez rugueux.
Pinot Noir Kugelberg – Cave de Ribeauvillé

Vin 9 : réduction fugace à l’ouverture puis fruité bien mûr par la suite, attaque ronde, matière bien concentrée et sensation moelleuse prononcée en finale.
Pinot Noir Clos Saint Imer – E. Burn

Le niveau qualitatif de cette troisième triplette est un peu plus homogène même si le style des trois cuvées révèle des différences bien marquées : élevé en barriques le pinot noir du domaine Becht se montre particulièrement élégant et raffiné (j’ai longtemps hésité à le placer en Bourgogne, c’est dire…), celui de la Cave de Ribeauvillé, issu d’un secteur granitique sur Rorschwihr, est flatteur sur le plan aromatique mais reste un peu agressif en finale, le Saint Imer est tout à fait charmeur mais sa sucrosité qui m’a semblée encore plus intense m’a conduit a situer son origine outre-Rhin.


Vin 10 : olfaction suspecte avec une touche liégeuse et lactée, léger et filiforme en bouche avec une dureté prononcée en finale.
Pinot Noir Rouge de Marlenheim-Tradition – R. Fritsch

Vin 11 : fruité bien mûr avec une touche d’évolution et des notes de brûlé, attaque tonique, matière dense et belle vivacité, finale assez agréable mais légèrement alcooleuse.
Pinot Noir Kanzel – H. Moebitz

Vin 12 : évolué et très complexe au nez avec un registre fruité et délicatement floral, joli volume en bouche, texture soyeuse et équilibre tonique, finale agréable et particulièrement sapide.
Pinot Noir Hommage à Gérard – Dom. de l’Oriel

Le quatrième trio donne franchement dans la diversité avec un premier échantillon visiblement défectueux (bouchage ?), un second vin dont je n’ai pas détecté l’origine étrangère qui séduit par sa gourmandise et sa générosité (peut-être un peu excessive !) et un troisième conçu par mon ami Claude (que je n’ai pas reconnu, évidemment !) qui m’a vraiment étonné par son équilibre et sa classe. Issu du coteau granitique du Brand ce pinot noir entre évidemment dans mon tiercé gagnant.


Vin 13 : nez peu plaisant, marqué par d’intenses notes torréfaction, attaque assez agréable, matière concentrée mais finale sèche avec des tanins serrés et agressifs.
Pinot Noir F – P. Blanck

Vin 14 : nez intense et flatteur avec des notes de cerise à l’eau de vie, rond, souple et généreux en bouche mais un peu trop marqué par l’alcool en finale.
Pinot Noir Letzenberg – V. Fleith

Vin 15 : retenu et raffiné au nez, fruits rouges et torréfaction discrète, attaque sur une fine acidité qui s’élargit pour équilibrer une matière bien charnue, minéralité assez saillante en finale.
Pinot Noir Rouge de Marlenheim-Tradition – R. Fritsch

Le pinot noir issu du Fustentum de Blanck se montre très renfrogné aujourd’hui…loin de la belle image laissée par une série dégustée en mars 2012 au domaine. Pour le second vin, le coteau argilo-calcaire du Letzenberg a visiblement exacerbé le côté solaire du millésime, par contre il faut relever la belle tenue de la cuvée de Romain Fritsch issue du coteau calcaire du Steinklotz…je le dis sans détour : celui qui aura reconnu le même vin que celui de la bouteille 10 est un tricheur !!!


Vin 16 : aromatique fine et raffinée sur les fruits rouges avec quelques nuances boisées très discrètes, matière ample, dense et volumineuse mais finale trop rustique avec des tanins asséchants.
Pinot Noir Les Rocailles – P. Ginglinger

Vin 17 : notes désagréables très persistantes (écurie, sueur de cheval…brett ?), matière ample et concentrée, toucher soyeux, trame tannique élégante mais retour aromatique assez déplaisant en finale.
Pinot Noir Strangenberg-Sans soufre – P. Frick

Vin 18 : fin et racé au nez, notes de fruits mûrs et de massepain, souple et élégant en bouche, joli volume et finale fraîche, finement acidulée et longuement aromatique.
Pinot Noir Hengst – P. Buecher

A cause d’un excès de dureté en finale, le Rocailles de Ginglinger, issu du grand cru Eichberg et élevé en barriques, n’entrera pas dans mon top 3…mais il s’en est fallu de peu ! Le Strangenberg sans soufre a tenu parfaitement son rôle de vin polémique : encensé par une partie des dégustateurs et détesté par les autres dont je fis hélas partie cette après-midi…dommage car la qualité de la matière était vraiment pas mal !
Le Hengst est superbe, j’ai spontanément pensé à un cru de la Côte de Nuits et je l’ai fait monter sans hésitation sur mon podium du jour.

Vin 19 : ouvert et expressif au nez avec un boisé très fin mais la bouche se montre assez rugueuse avec des tanins austères qui durcissent la finale pourtant bien longue.
Nuits Saint Georges 1°Cru Clos de la Maréchale – Domaine Faiveley

A vrai dire, je pensais que cette bouteille venait d’être apportée par un vigneron et raccrochée in-extremis à cette longue série : je l’ai dégustée sans arrière-pensée et sans suspecter une nouvelle intrusion « étrangère » dans cette série. Ceci dit, malgré son aromatique raffinée qui témoigne d’un élevage de grande qualité, la dureté en bouche de cette cuvée m’aurait de toute façon fait rester en Alsace…et une boulette de plus dans ma copie, AIE !!!


En conclusion :

- Intéressante et particulièrement formatrice cette dégustation à l’aveugle nous a permis d’évaluer sans aucun a priori les qualités et les défauts que nous ressentions sur chaque vin. Ceci dit, avec l’effort de concentration et d’analyse de sensations que demandait cet exercice, la notion de plaisir a été largement occultée…dommage !
J’ai d’ailleurs d’autant plus apprécié le moment de convivialité impromptu en fin de séance lorsque Philippe Blanck nous a régalés avec deux cuvées de pinot noir de 1990 : une cuvée classique juteuse et pleine de fruit et un « F » dense et caressant.
Même si je suis convaincu que ces exercices très cadrés et souvent fastidieux sont indispensables pour éduquer le goût, je resterai quand même toujours un adepte du vin plaisir, convivial et festif…qui a dit IVROGNE ?

- Dans cette longue série la plupart des échantillons alsaciens présentaient un profil assez caractéristique avec des matières bien concentrées mais des présences tanniques beaucoup trop virulentes. A croire que face à une matière première quasiment inédite nos vignerons se sont un peu emportés en exagérant les extractions et le boisage.
Pour moi 2003 fut le millésime où j’ai redécouvert le plaisir de boire les pinots noirs alsaciens : dotés d’une richesse et d’une gourmandise très inhabituelles ces vins m’ont vraiment régalé dans leur jeunesse.
Après 10 ans de garde, je retrouve assez facilement cette impression de concentration dans les jus mais les trames tanniques de la plupart des vins se sont considérablement durcies avec l’âge…avec cette expérience, je ne suis pas sûr qu’il fallait attendre trop longtemps avant de boire les 2003.

- En ce qui concerne le podium demandé par Thierry, je choisirai le trio suivant : Marsannnay du domaine Bart – Hommage à Gérard du domaine de l’Oriel – Hengst du domaine Buecher.

- Merci à Thierry de poursuivre son œuvre de formation œnophile.

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